Par Frédéric Lapras, Président de R.Flex Progiciel
Anonymisation des données : le CV…et bien plus !
Instauré par la loi sur l’égalité des chances de 2006, le CV anonyme a fait couler beaucoup d’encre mais n’a jusque-là été mis en œuvre que par quelques grandes entreprises, dans le cadre d’une expérimentation à l’échelle nationale, dont les résultats seront connus cet automne. Selon les concepteurs de la loi, c’était pourtant l’une des mesures phares du texte, pensée pour réduire les risques de discrimination à l’embauche.
Pourtant, les technologies pour anonymiser un CV, de façon entièrement automatisée, en temps réel, en remplaçant les critères potentiellement discriminants par une série de caractères alphanumériques, sont opérationnelles depuis bientôt deux ans.
L’anonymisation des données ne doit d’ailleurs pas se limiter au processus de recrutement. Car une carrière ne se construit pas seulement en changeant régulièrement d’entreprise ! Elle se décline au travers de la gestion de la mobilité interne et de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), pour réduire les risques de discrimination en interne.
Des sites Web accessibles
A l’ère où Internet devient un canal incontournable de diffusion des offres d’emploi et de candidature en ligne, le législateur européen est également en train de renforcer les obligations des entreprises pour permettre aux personnes en situation de handicap de postuler. En France, les premiers décrets d’application ont été publiés, notamment dans la fonction publique qui s’est vu obligée de mettre en ligne des sites « accessibles » à partir du 1er janvier 2010.
Or, en matière de handicap visuel, les sites d’emploi sont encore loin de répondre aux recommandations de la norme AccessiWeb, qui recense les dispositifs à mettre en œuvre pour permettre aux personnes en situation de handicap, d’accéder à l’information du Web.
Pourtant, de nombreux outils existent déjà : fonction loupe, offres d’emploi en « podcast » ou en vidéo sous-titrées, navigation avec des touches de fonction, etc. Pour les entreprises, c’est aussi un des moyens d’atteindre le quota obligatoire de 6% de salariés en situation de handicap.
Recrutements sans CV : compétences et aptitudes versus diplômes
Combien de candidats ne passent même pas le barrage du CV, faute de diplômes qui ne correspondent pas aux préjugés et aux critères des recruteurs ? Pourtant, la diversité, c’est aussi s’entourer de profils divers et variés, voire atypiques et venus d’horizons très différents, et qui peuvent même apporter une certaine ouverture d’esprit… Une fois en poste, au-delà de tout diplôme, ce sont ses expériences, ses compétences et ses aptitudes, qui permettront au nouvel embauché d’assurer ses fonctions.
Là encore, les outils informatiques sont prêts, sans avoir pour autant à réaliser des développements spécifiques. En lieu et place du formulaire classique de candidature (avec ou sans CV joint), les sites d’emploi peuvent dorénavant choisir de proposer des pré-entretiens écrits, avec des questions pour tester la motivation, la personnalité, la connaissance du secteur d’activité ou encore du marché, les compétences nécessaires au poste, les références…
Ces formulaires peuvent même avoir l’apparence d’un simple document bureautique (Word ou Excel par exemple), et être envoyés par messagerie. Une fois complétés, ils viennent automatiquement alimenter la base de données du recruteur.
Ces outils ont été adoptés par quelques entreprises en France, et les premiers retours sont très positifs.
Moyens pour mesurer et contrôler de la diversité
L’ensemble de ces technologies ne se suffisent pas en elles-mêmes. Pour « piloter » la diversité, elles doivent être complétées par la mise en place d’indicateurs clés, tout au long des processus RH, pour permettre à l’entreprise d’identifier les « bonnes ou les moins bonnes » pratiques (par exemple, les rendez-vous annulés suite à la levée de l’anonymat pour les recrutements externes), ou d’observer de façon précise son positionnement vis-à-vis de certaines catégories socioprofessionnelles, telles que les femmes ou les seniors (analyses sur la pyramide des âges par type de poste, évolution du salaire en fonction du sexe, etc., pour la gestion interne des collaborateurs).
En résumé, les outils informatiques pour lutter contre les discriminations existent aujourd’hui et font l’objet d’améliorations en continu, en fonction des retours d’expérience des entreprises qui les utilisent. Mais comme toute autre technologie, ils ne se substituent pas à une stratégie et à une communication d’entreprise visant à changer les mentalités.