par Roger Burkhardt, CEO d’Ingres
Prévision N° 1 : L’open source aura le vent en poupe même dans un contexte économique plus propice
Le génie est sorti de sa bouteille. La récession de 2003 nous l’a appris : les utilisateurs finaux qui ont goûté à l’open source (plus précisément Linux) ne sont pas revenus automatiquement aux systèmes propriétaires, même s’ils avaient davantage de moyens. C’est même le contraire qui s’est produit. Linux a gagné du terrain dès lors que les clients pouvaient entreprendre des projets plus ambitieux et se sentaient plus à l’aise avec l’open source, sa performance et le support associé. Nous sommes encouragés par la demande croissante que nous avons suscitée en 2009 et pensons que 2010 verra toujours plus d’open source. Malgré l’amélioration de l’économie, nous sommes convaincus que les clients finaux surveilleront de près leur budget IT et continueront à se tourner vers l’open source. Ce faisant, ils diminueront leur dépense informatique globale, à court et à long terme, en évitant toute sujétion vis-à-vis d’un fournisseur.
Les fournisseurs de logiciel indépendants (Independent Software Vendors, ISV) se tournent résolument vers l’infrastructure open source à la fois dans le cadre de leurs applications existantes et de leurs nouvelles offres « cloud computing ». Compte-tenu de leur nombre et des nombreuses ventes qu’ils réalisent, ils démultiplient l’adoption de solutions d’infrastructure open source.
Les gouvernements et administrations accéléreront leurs programmes open source car, ils doivent eux aussi réduire les coûts et accroître l’efficacité, pour deux raisons principales : le sauvetage du secteur financier et les dépenses incitatives massives. Une seconde vague de politiques gouvernementales vise à favoriser l’orientation des dépenses vers des solutions open source.
Prévision 2010 N° 2 : nous verrons l’introduction en bourse (IPO, initial public offering) d’une société open source non-Linux en 2010.
Le taux de croissance de certaines sociétés open source a été impressionnant (50 % et plus). Nous pensons aussi qu’une poignée d’entre elles a franchi les 50 millions de dollars de facturation, ce qui a généré l’intérêt de Wall Street. La communauté des investisseurs est en quête de nouvelles idées et l’open source (ainsi que le cloud computing) est un modèle qui les séduit, du fait de sa grande visibilité. Le segment Enterprise Content Management (ECM) en open source a été en effervescence et nous ne serions pas étonnés en 2010 de voir émerger de ce segment un candidat à l’introduction en bourse (IPO).
Prévision 2010 N° 3 : les solutions SaaS (Software-as-a-Service) et de type cloud seront en croissance, entraînant dans leur sillage l’open source et les standards ouverts.
Nous l’avons dit en 2009 et nous le redisons. Sans prendre de grands risques avec une telle prévision, l’avenir est au cloud computing. Ce cycle pourrait prendre une décennie, le temps pour les entreprises d’élaborer les technologies correspondantes. La sphère du capital-risque s’est entichée du concept cloud. Et beaucoup de ses acteurs n’investiront dans du logiciel que s’il est estampillé cloud computing. Répétons-le, l’open source se distingue par ses modèles économiques et innovants supérieurs. C’est en 2010 que l’open source prendra du galon dans les applications cloud pour englober les serveurs d’applications, les bases de données, les outils d’intégration et l’administration système.
2010 devrait également être l’année des standards ouverts, enfin reconnus comme un facteur de réussite déterminant, tant pour le SaaS que pour le cloud computing. Les clients utilisent des centaines ou des milliers d’applications dont l’interopérabilité doit se faire en douceur, quel que soit le modèle, traditionnel ou SaaS. Le modèle SaaS initial basé sur des systèmes propriétaires, tel que salesforce.com nous rappelle le « pré carré » d’AOL qui fut balayé par les standards Internet. Et il ne fera guère plus que convertir une poignée d’applications internes telles que la gestion de la relation client (CRM, customer relationship management). Il s’avérera que, pour convertir une bonne partie de ces quelque 1000 applications client, les standards ouverts seront nécessaires à tous les niveaux. Y compris les interfaces au niveau applicatif comme celles des traders dans le secteur de la bourse et de la finance (FIX et fpml).
Prévisions 2010 N° 4 : les fusions et acquisitions de l’open source continueront et IBM finira par entrer dans la danse.
Malgré des déclarations d’amitié (sincères) vis-à-vis de l’open source, IBM n’a fait que très peu d’acquisitions dans ce secteur. Nous pensons que cela changera en 2010, de plusieurs manières : par l’acquisition d’un fournisseur d’OS, d’un fournisseur de bases de données, voire d’un fournisseur d’applications (Big Blue revient tranquillement sur le marché applicatif après une décennie d’absence). À surveiller.
Prévision 2010 N° 5 : les éditeurs propriétaires feront un pas de plus en changeant leurs business models.
Nous pensons que d’autres fournisseurs, comme Microsoft et IBM, emboîteront le pas à Oracle et offriront tout ou partie de la pile d’infrastructure par abonnement. Partant du principe que le cloud computing est l’avenir du logiciel, les éditeurs propriétaires devront accorder ce que le marché exige : une tarification plus souple. D’ailleurs, cette prévision ne concerne pas que 2010 : c’est de cette manière que le logiciel sera acheté et vendu à l’avenir.
Prévision 2010 N° 6 : les piles open source commenceront à représenter un chiffre d’affaires appréciable pour les fournisseurs d’open source.
Les clients achètent des solutions plutôt que des produits ponctuels. D’où la création des piles open source et l’évolution du marché des appliances open source. Il nous semble que 2009 a été l’année pendant laquelle Ingres et d’autres fournisseurs ont préparé le terrain et suscité l’intérêt des clients. Notre message autour du concept de New Economics of IT et la prépondérance d’une pile open source alternative par rapport à LAMP (Linux, Apache, MySQL, PHP) sont bien passés auprès des clients. De gros investissements vont au packaging logiciel, nécessaire pour que les fournisseurs de logiciel indépendants (ISV) et les clients puissent créer automatiquement et maintenir une grande variété de piles logicielles. Et 2010 nous devrions donc voir une bonne partie de cet investissement se transformer en chiffre d’affaires pour les fournisseurs open source.
Prévision 2010 N° 7: Les intégrateurs systèmes vont continuer à adopter des solutions open source.
Les intégrateurs systèmes suivent le mouvement des intentions d’investissement IT des clients. En ligne de mire : le tandem cloud computing et open source. Nous prévoyons qu’en 2010 les grands intégrateurs systèmes globaux pratiqueront de plus en plus les deux, car c’est là que se concentre la demande des clients. La dynamique est enclenchée : face à des clients de plus en plus tournés vers l’open source, les intégrateurs systèmes jouent un rôle majeur dans l’intégration de projets open source et dans leur inclusion au sein de la stratégie IT globale. Et ils vont plus loin, en conseillant les clients en matière de licences et de rétributions. Pour nous, il est clair que, dans les années qui viennent, les intégrateurs systèmes contribueront énormément à la généralisation de l’open source.