Channel Insider France – Monsieur Guy Tubiana bonjour, vous avez racheté récemment l’activité intégration ERP d’Access Commerce. En pleines turbulences économiques et alors que le secteur informatique est très touché, la croissance externe est-elle une réponse ?
Guy Tubiana – La crise économique, et celle-ci plus que toute autre, va conduire les entreprises à se concentrer sur leur cœur de métier pour rationaliser l’utilisation de toutes leurs ressources (financières, humaines, matérielles), améliorer leur positionnement et leur compétitivité. L’acquisition de l’activité intégration ERP d’Access Commerce s’inscrit pour nous, comme pour le cédant, dans cette perspective. Pour TVH Consulting il s’agit avant tout de se renforcer sur son marché en élargissant sa base clients et en complétant son offre verticale Multi-canal. Cette opération s’est réalisée concomitamment à notre implantation dans les îles britanniques au travers de la signature d’un accord de distribution exclusif avec notre partenaire Maginus (100 personnes et 15 M€ de CA dans l’intégration de son propre ERP) qui va dédier progressivement la totalité de ses ressources à la distribution de notre solution MCC (Multi Channel Commerce) pour Dynamics AX de Microsoft. Cette acquisition et cet accord stratégique sont également le moyen de réaffirmer nos ambitions, tant à l’échelle nationale qu’internationale.
Quelles sont les tendances du marché que vous observez ?
Sur le front des ERP, il y a plusieurs tendances très nettes sur le marché :
• L’ERP est plus que jamais le cœur incontournable du système d’information : une seule plateforme technologique, une seule base de données, une interface graphique universelle pour servir le business model de l’entreprise. Il est difficile de rationaliser et d’internationaliser son organisation quand le système d’informations n’est pas homogène.
• La demande de solutions verticalisées : l’ERP doit supporter en standard l’essentiel des processus métiers de l’entreprise.
• L’internationalisation du choix : l’ERP est un choix « groupe » qui facilite l’intégration des filiales et fédéralise sa culture dans toutes ses dimensions (offre, produits, savoir faire, organisation).
• Une garantie de pérennité de la solution pour les 10 à 15 ans à venir : c’est la durée de vie envisagée pour un investissement stratégique.
• Flexibilité et adaptabilité pour permettre au système d’information non seulement d’accompagner l’évolution de l’entreprise, mais aussi de la précéder pour en devenir le fer de lance. L’ERP devient instrument de compétitivité et de différenciation.
Du côté de la demande, le contexte économique actuel conduit à rationaliser les investissements. Le choix stratégique d’une solution ERP devient critique pour une entreprise ou un groupe, ce qui favorise le glissement des décisions dans le temps. Cependant, les enjeux sont tels dans la période actuelle qu’aucun projet n’est remis en cause.
Par ailleurs, il apparaît clairement que les entreprises des secteurs les plus touchés rencontrent des problèmes de financement de leurs projets ERP et, plus généralement, de tous leurs investissements.
Quel est le rôle des éditeurs dans ce contexte ?
Du côté des éditeurs, la concentration du marché est déjà entamée car les budgets de R&D ont explosé sous le poids de la verticalisation des solutions et de l’internationalisation de l’offre. Pour TVH Consulting, 5 éditeurs répondent aux critères précédents : SAP, Oracle, Microsoft Business Solution, Sage et Lawson. Nous constatons également une présence accrue des éditeurs aux côtés de leurs partenaires intégrateurs au moment du choix d’un ERP par une entreprise. Cette présence s’explique pour deux raisons essentielles : il faut rassurer l’entreprise sur la pérennité de la solution aux travers d’engagements forts (technologie, évolution, support, …), et montrer sa proximité, voire sa complicité avec son partenaire intégrateur qui sera le garant de la réussite de la mise en œuvre du projet ERP.
Votre acquisition correspond également à une extension de votre présence territoriale : vous ouvrez des bureaux à Toulouse et Lyon. La proximité est-elle un facteur de performance commerciale pour les intégrateurs ?
Dans notre métier il est indispensable de bien connaître ses clients, partenaires et prospects. Face à un marché qui est assez atomisé, la taille et une présence locale sont des facteurs importants dans la prise de décision. Aujourd’hui, nos clients sont internationaux et nous intervenons sur les 5 continents en tant que Maître d’œuvre de tous nos projets aux travers d’un réseau de partenaires sous-contractants dont nous garantissons intégralement les prestations. Cependant en France, nous effectuons nous-mêmes la totalité de nos prestations. Aussi, l’implantation d’agences régionales favorise le développement de relations humaines fortes et d’un partenariat de proximité. En France, nos prochaines implantations devraient se situer en Bretagne et dans l’Est. A l’international, deux partenariats stratégiques sont en cours de discussion : un partenaire exclusif pour couvrir l’Allemagne et un autre pour représenter notre offre en Asie-Pacifique à partir de Hong-Kong. Pour 2009, nous visons une croissance organique de l’ordre de 20 % et une croissance externe consécutive à l’acquisition de l’activité ERP d’Access Commerce du même ordre. Nous devrions dépasser les 13 M€ de CA pour un REX qui devrait se situer autour des 10 % tout en continuant nos investissement en R&D sur nos offres verticales.
La situation économique actuelle devrait nous permettre d’envisager d’autres acquisitions totalement en ligne avec notre stratégie de n’avoir qu’un seul métier : l’expertise ERP.
Selon vous, comment le secteur logiciel dans son ensemble peut-il sortir de la crise ? Quels sont les choix stratégiques à opérer ?
Le secteur du logiciel comme celui des services d’intégration et de support devrait se concentrer plus rapidement et ressortir plus fort de cette crise. Certains éditeurs, qui n’ont pas su faire les bons choix technologiques, ou qui n’ont pas su se développer à l’international, ou dont les moyens sont insuffisants, devraient être absorbés et voir leur offre disparaitre assez rapidement. Ce processus devrait favoriser l’émergence de 4 à 5 éditeurs d’ERP internationaux.
Dans le même temps, ces grands éditeurs n’auront pas la possibilité d’intégrer tous les métiers dans leur offre soit pour des raisons de pertinence économique, soit tout simplement pour des raisons de possibilité et de viabilité. Aussi, ils devront s’entourer de réseaux de partenaires de plus en plus verticalisés et internationaux sur des offres métiers et à qui ils laisseront le soin de développer des logiciels complémentaires à leur offre. C’est le concept naissant d’Add-Ons certifiés chez Microsoft et chez Sage (à l’image de notre solution MCC pour Dynamics AX) ou la notion de pré-paramétré chez SAP.
De ce qui précède, il est facile d’en déduire le développement de réseaux ou de groupes de services d’intégration ERP de plus en plus verticalisés orientés vers les seuls métiers de leurs clients. Enfin, les intégrateurs devraient offrir de plus en plus de services d’hébergement ou, plus encore, des offres SaaS.