Cloud, mobile, robots, intelligence artificielle… Stéphane Chabert, solution architect chez Avanade, l’intégrateur des technologies Microsoft, fait le point des leviers que le retail peut activer pour tirer profit des mutations à venir.
C’est le principal enseignement d’une enquête sectorielle réalisée par EKN Research pour Avanade auprès de 161 dirigeants : les professionnels du retail peinent à préparer leurs collaborateurs aux mutations numériques qui bouleversent l’expérience client. Mais des leviers peuvent être activés pour accompagner ces changements et en tirer profit. Les explications de Stéphane Chabert, solution architect chez Avanade, l’intégrateur né du projet de coentreprise entre Accenture et Microsoft.
ChannelBiz.fr – Selon l’enquête EKN Research/Avanade, les points de vente se transformeraient en centres de retrait de commandes en ligne à horizon 2020. L’approche thématique de la vente gagnant du terrain. Quelle est la situation en Europe ?
Stéphane Chabert – Le rôle des points de ventes a déjà commencé à changer, en Europe comme ailleurs. Il s’agit davantage de rôles multiples que d’une spécialisation qui peut être une question d’opportunité à saisir (pop-up store). Aujourd’hui, les différentes expériences client convergent vers le magasin. On va lui demander de devenir de plus en plus flexible : à la fois show-room, point de retrait, magasin traditionnel… Il doit aussi pouvoir accueillir différents thèmes ou de l’évènementiel. La mutation est en cours et prend corps, l’enquête le montre. Mais le magasin de demain n’est pas figé. Il peut encore se chercher ou gagner en souplesse et s’adapter.
Que propose Avanade aux distributeurs/retailers pour négocier ce changement ?
Nous n’avons pas le plan type du magasin de demain. En revanche, nous travaillons à définir et mettre en place les outils qui permettront de l’exploiter. Et ce, en étant à l’écoute du client et du collaborateur. Ce dernier joue forcément un rôle clé dans cette transformation.
Je vous donne deux exemples, l’un pour illustrer la démarche actuelle, l’autre pour nous projeter vers l’avenir. Pour commencer, je pense que l’on connaît tous, par notre expérience personnelle, le rôle clé des produits frais dans un hyper sur l’image et la fidélisation à la marque. Mais l’envers du décor est complexe, car le frais et l’ultra-frais sont une question d’ajustement permanent : saisonnalité et assortiment variant, approvisionnement à la journée et multi-sources, fragilité et pénurie des produits, gestion de stock compliquée (pesée client, détérioration, gestion du rayon)… Sans oublier l’intégration délicate à de nombreuses briques des systèmes d’information.
Nous avons analysé, avec l’un de nos clients, les activités et les outils des chefs de rayon et d’autres personnes intervenant dans la chaîne de valeur. Le résultat de la collaboration avec nos équipes (user experience, design thinking et devops) est une application mobile développée en mode agile. Elle permet d’optimiser le temps, fiabiliser les commandes, rester au plus près du client et du produit, améliorer la fraîcheur et la qualité. Et de fournir au manager des indicateurs de pilotage.
Pour se projeter un peu, on peut également s’intéresser au concept de « supermarché du futur ». Avanade l’a présenté en 2016 lors du NRF Retail’s Big Show à New York, et sa mise en oeuvre a débuté en Italie, notamment. Il s’agit d’interagir avec le client au moyen de miroirs connectés et d’écrans tactiles, entre autres. Nous réfléchissons aussi au « droit » pour le client de changer d’avis [à la dernière minute]. Que se passe-t-il si le client n’a pas le temps de passer au magasin et de retirer sa commande passée en ligne ? Que peuvent faire les dirigeants du retail et leurs collaborateurs ? Ici, nous ne sommes plus dans la logistique du dernier kilomètre, mais des derniers 100 mètres… Une « liquid workforce », autrement dit des équipes plus agiles (soutenues par les technologies mobiles, le Cloud et les solutions analytiques), pourrait répondre aux attentes.
Les robots et les applications d’intelligence artificielle (IA) vont-ils remplacer les vendeurs ?
Vous pointez du doigt deux formes d’interactions nouvelles entre le distributeur et ses clients : les robots du hardware, type Pepper, ou du logiciel, type agent conversationnel. L’IA permet aujourd’hui de « comprendre » les émotions, qui sont le plus puissant facteur déclencheur d’achat. Le robot Pepper de SoftBank Robotics permet d’engager une relation différente, non biaisée par une volonté de vendre. Il s’agit surtout d’un différenciant marketing (par exemple, une augmentation du capital sympathie qui se traduit par la visite du magasin sans besoin d’un produit en particulier).
Ces outils ne sont pas – encore ? – des menaces pour les humains, pour trois raisons au moins : les robots hardware coûtent encore chers ; les capacités cognitives, émotionnelles et culturelles de ces machines sont limitées (manque d’à-propos, de chaleur, de fluidité) ; le besoin de contact humain est affirmé dans les magasins. Alors, la numérisation de tous les points de vente pourrait-elle éliminer l’un des derniers chaînons humains ? C’est peu probable pour les magasins physiques, mais c’est déjà le cas en ligne lorsque l’on navigue sur Amazon ou sur Fnac.com : il n’y a pas de rencontre avec un vendeur humain, mais des moteurs de recherche et des algorithmes. Malgré tout, aujourd’hui, les robots et les applications d’intelligence artificielle sont surtout des aides à la décision puissantes. Ces aides facilitent et optimisent le travail des vendeurs humains. Le retail, comme d’autres secteurs, devra aménager l’espace vendeurs (humains ou robots) et réinventer l’expérience client. Il devra aussi créer de nouveaux métiers, de nouveaux points de vente et de nouveaux produits et services.
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